Comment agit la méditation
Pour comprendre comment agit la méditation, et pourquoi tous les neuroscientifiques, chercheurs, philosophes ou enseignants s’accordent pour en chanter les louanges, il est intéressant préalablement de comprendre comment fonctionne le système nerveux. Car c’est à travers celui-ci, qui organise et régit la circulation de l’information à l’intérieur du corps, que vont se déployer tous les bienfaits des pratiques dites méditatives. On tente d’y voir plus clair ensemble ?
Comprendre le système nerveux en méditation
Le système nerveux est un système de communication électrique et biologique, qui pilote la transmission des informations de toute nature dans le corps et le cerveau. Il “traite” la réception, l’échange et la réponse. Il garde la mémoire de toutes nos expériences au niveau cellulaire, et permet ainsi à l’organisme de développer des fonctions d’apprentissage et d’adaptabilité au changement.
Très schématiquement, ce système nerveux (SN) se décompose en système nerveux central (du cerveau à la moëlle épinière) et systèmes périphériques. Ceux-ci se déclinent en SN somatique (qui innerve les muscles et permet le mouvement) et SN autonome. Et dans cette sphère autonome, on retrouve le SN entérique (relié au cerveau primitif, il gère notamment la digestion), le SN sympathique (celui de l’action, de la mobilisation, du stress) et le parasympathique (celui des rêves, de la relaxation, de l’hypnose) … Vous comprenez aisément la complémentarité et le besoin d’équilibre des ces systèmes nerveux ?
Chaque temps de méditation va permettre de se reconnecter à cette matrice fonctionnelle et émotionnelle qu’est le système nerveux, d’accéder sur un plan subtil aux mémoires qui alimentent nos circuits nerveux, psychiques, etc.
La méditation va également nous permettre d’équilibrer volontairement notre système nerveux autonome pour retrouver le calme et apaiser le bouillonnement intérieur. Car dans le silence, le non-agir, l’immobilité yeux fermés, nous allons instinctivement placer en retrait notre système nerveux sympathique – le « volontaire » - pour laisser la place à son antagoniste, le système nerveux parasympathique – « l’automatique ». Car ces deux réseaux nerveux autonomes fonctionnent chez n’importe quel être humain conjointement mais en alternance, indépendamment de notre volonté. Ils régulent pour l’un les actions et réactions volontaires (marcher, penser, agir, manger…), et pour l’autre les schémas automatiques de tout notre corps (rêver, bailler, digérer…).
Aujourd’hui on sait que le système sympathique devrait être le moins actif car il est le plus consommateur d’énergie, donc fatiguant pour l’organisme ; or il est encore et toujours plus sollicité par la suractivité, la gestion du stress, le besoin permanent de faire quelque chose, d’agir dans l’urgence... Alors que le système parasympathique, agissant par automatisme, permet, lui, de mettre le corps et l’esprit au repos pour mieux les régénérer. Vous comprenez de quel côté devrait pencher la balance ? La bonne nouvelle c’est qu’il existe des pratiques qui peuvent nous permettre de maîtriser cette activité du système nerveux, de le rééquilibrer pour assurer l’homéostasie du cœur et l’équilibre organique, et la méditation en fait partie, avec des résultats évalués scientifiquement comme remarquables.
A quoi sert la méditation
Outre l’équilibre du système nerveux évoqué précédemment, la méditation apporte des bienfaits réels sur notre activité cérébrale. Car le cerveau qui médite est un cerveau dont l’activité se ralentit. Le flux incessant des pensées s'estompe. Dans les textes anciens en sanskrit on parle de Yoga citta vritti nirodha comme étant le but de toute pratique de méditation. Si citta est le principe de l’activité intellectuelle et affective, les vrittis sont tous les mouvements qui agitent l’esprit. La méditation est donc une recherche de la cessation des perturbations du mental… C’est une expérience suprasensorielle et supra rationnelle.
Dans l’imagerie traditionnelle indienne, le yoga est le cocher d’un char, notre mental, qui guide et discipline ses chevaux, ses pensées, pour les mettre « sous son joug » … « Toutes les fois que l’esprit, remuant, instable, se porte ailleurs, chaque fois il faut le maîtriser et le ramener sous le contrôle du Soi. » lit-on dans la Bhagavad-Gita.
Évoquée dans de nombreux textes comme étant le sens de la quête du pratiquant de yoga, la méditation consisterait donc à neutraliser et immobiliser le mental. On mesure ici toute la difficulté que nous connaissons à lutter contre notre pensée qui se porte vers mille objets d’attention ! Ces objets de distraction et de perturbation du mental, ces vrittis sont – et nous le savons tous intuitivement, ce qui nous empêche de trouver le calme profond à chaque fois que nous en aurions besoin. C'est tout le sens de la méditation, travailler ce retour à l’état de calme qui permet de développer clairvoyance, recul, lucidité, créativité, concentration.
Par une pratique de méditation régulière en pleine conscience nous pouvons identifier et modifier notre schéma de stockage des informations dans notre système nerveux tel que décrit ci-dessus. En premier lieu, nous identifions mieux les scénarios qui vont venir perturber notre équilibre nerveux, et nous améliorons notre capacité de réaction, ou plutôt de non-réaction. Reconnaître les situations qui diminuent notre sentiment de sécurité par exemple permet de comprendre les schémas déclencheurs de stress, et de mieux les éviter ou les contourner. En ce sens méditer est aussi une source de développement de notre adaptabilité au changement. Avec un entraînement régulier nous pouvons reprendre le contrôle de notre système nerveux et développer notre conscience sensorielle, émotionnelle, psychique…
« Alors que tout dans la vie est une occasion de se mesurer aux autres et d’accomplir des performances, la méditation ouvre un espace où il n’y a rien à prouver. Nous sommes là simplement pour se connaître, s’accepter inconditionnellement, s’aimer, sans apporter de jugement sur ce que nous faisons ou pensons. Nous communiquons avec l’ensemble de nos énergies sans aucune dévalorisation de soi-même. Toute énergie est précieuse. La colère, la jalousie, la violence, la négativité recèlent autant d’énergies que leurs contreparties que nous jugeons positives. En cessant d’étiqueter et de classer nos impulsions, nous profitons d’une fabuleuse réserve énergétique que nous utilisons dans la méditation et l’attention au monde. Il n’y a pas de progrès, dans le sens où nous progressons dans la pratique d’un sport ou d’un jeu. Tout peut arriver très vite si nous acceptons simplement de nous asseoir en toute liberté. Il n’y a rien à apprendre, pas d’étude de textes, ou de principes ésotériques, il suffit de se laisser être en dehors de toute contrainte mentale et physique. La seule chose indispensable est d’avoir le désir de se connaître soi-même, de profiter pleinement de la vie et de se libérer de la souffrance. »
Tantra – Daniel Odier
Qu’appelle-t-on l’EMC ou état modifié de conscience
Terme de plus en plus répandu, l’état modifié de conscience désigne tout état mental différent de l’état d’éveil ordinaire (notre mode de fonctionnement rationnel) : rêves et rêves lucides, états hypnotiques, états sophroniques, intuition, créativité, transe, méditation, relaxation, états mystiques… Parce que le cerveau humain est un récepteur-émetteur d’ondes, il émet des ondes de fréquences différentes selon l’état de conscience dans lequel il se trouve, ce qui peut provoquer un ou des états de conscience différents. Ces états sont naturels donc non pathologiques, mais on sait désormais qu’ils peuvent être induits par la simple volonté et/ou par des techniques thérapeutiques spécifiques utilisées dans certaines méthodes du développement personnel comme le yoga - notamment le yoga nidra -, la méditation, la sophrologie, l’hypnose, la musicothérapie… Ils correspondent à un ralentissement des ondes électriques du cerveau (des ondes bêta à l’état de veille, aux ondes delta pour le sommeil profond).
Intuitivement connu et utilisé depuis toujours par les chamans, les moines bouddhistes ou les magnétiseurs, l’EMC est aujourd’hui considérée comme une possible alternative d’avenir de la psychothérapie. En déconnectant le mental de ses automatismes inhibiteurs, de ses peurs, de ses angoisses, l’EMC permettrait de prendre du recul par rapport à son « je » présent. Cet état offrirait un espace idéal pour toucher à une forme de réalisation, un élargissement de la vision ou de la compréhension de soi. Car des images peuvent s’y former pour véritablement bousculer la psyché, l’interpeller en un éclair et lui apporter des réponses à des questions non formulées en état de conscience. C’est ce qu’il peut survenir en méditation.
Quelles sont les ondes cérébrales humaines susceptibles de modification en méditation
Les ondes bêta : de 12 à 20 hertz, ce sont les ondes rapides émises en état d’éveil, d’activité, nous permettant d’être alerte, et de traiter des informations. Le niveau de hertz augmente avec le stress.
Les ondes alpha : de 8,5 à 12 hertz, ce sont les ondes émises en état de relaxation, notamment lorsque les yeux sont fermés ou que nous sommes en méditation. On oscille alors entre sommeil et éveil, entre inconscient et conscient.
Les ondes thêta : de 4,5 à 8 hertz, ce sont les ondes émises en état de méditation profonde, de somnolence ou d’hypnose. Ce sont aussi les ondes émises en phase de rêves. Elles permettent au corps de se régénérer en profondeur.
Les ondes delta : de 0,1 à 4 hertz, elles correspondent à un état de sommeil très profond, sans rêve, mais on les retrouve aussi chez les nourrissons. D’après les scientifiques ces ondes peuvent être produites au cours de certaines expériences mystiques, avec un sentiment de connexion à l’infini qu’on pourrait rapprocher du samadhi. On dit aussi qu’elles sont des ondes guérisseuses…
Les ondes gamma : de 40 à 80 hertz, elles apparaissent en cas d’activité cérébrale particulièrement intense, intellectuelle ou créative.
Comprendre ces différents types d’ondes cérébrales nous permet de mieux appréhender l’activité cérébrale et électromagnétique en jeu dans la méditation et l’impact de cette pratique sur nos états de conscience et par là nos états émotionnels, nos états d’attention, nos états de créativité…
En synthèse
Si l’expérience prime évidemment sur la théorie, en méditation encore plus que dans n’importe quel domaine, il nous semble important de partager avec vous ces grandes notions physiologiques pour vous aider à comprendre pourquoi et comment cette pratique agit sur vous. Il n’y a rien de mystérieux, encore moins de mystique. Le corps est une machine puissante et d’une intelligence complexe rare. Le Système nerveux et ses nombreuses ramifications sont un territoire d’exploration qui mériterait à lui-seul une encyclopédie, mais prendre le temps d’en comprendre les rudiments schématiques est passionnant pour celui ou celle qui s’intéresse à la méditation.
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